La
droite internationale rencontre l'aile dure de
l'opposition argentine
Stella
Calloni
EN réponse à l’appel de la
fondation Libertad, financée par l’Héritage Foundation,
fer de lance du mouvement conservateur aux États-Unis,
et d’autres organisations d’extrême droite, des
représentants de la droite internationale la plus
radicale et active se sont réunis avec l’aile dure de
l’opposition argentine et d’autres pays d’Amérique
latine.
La rencontre s’est déroulée au
siège de la Bourse de commerce de Rosario, et parmi les
invités figuraient Carlos Alberto Montaner, journaliste
anticubain accusé d’être un agent de la CIA, Alvaro
Vargas Llosa, fils du romancier péruvien Mario Vargas
Llosa et l’un des principaux promoteurs de cette « Fondation
internationale pour la liberté » (FIL) et, via
téléconférence, l’ancienne députée vénézuélienne Maria
Corina Machado, l’une des instigatrices des actions
putschistes qui ont secoué le Venezuela ces derniers
temps.
L’essentiel des débats a tourné
autour du thème « Argentine 2025 : les défis de la
prochaine décennie », visant à relever « les erreurs et
les réussites des politiques menées ces dernières années »,
ainsi que les grands « problèmes » qui, selon eux « frappent
ce pays, comme l’insécurité, la corruption et le
libertinage ».
Comme aux réunions précédentes,
il a également été question de pays comme le Venezuela,
la Bolivie, l’Équateur, à savoir les plus avancés dans
les processus d’intégration, que les participants n’ont
pas hésité à qualifier de « dictatures » ou de « populismes ».
En mars 2008, lors de la grève
de près de quatre mois (lock out) décrétée par les
quatre principales organisations patronales du secteur
agricole, une action considérée comme une tentative de
coup d’État ou de déstabilisation contre le gouvernement
de Cristina Fernandez de Kirchner, la Fondation Libertad
avait tenu dans cette même ville de Rosario une réunion
avec des personnages comme Roger Noriega, ancien
ambassadeur des États-Unis auprès de l’Organisation des
États américains (OEA), José Maria Aznar, ancien
président du gouvernement espagnol, et d’autres
politiciens d’extrême droite de la région et d’Europe.
Cet entretien fut perçu par des nombreux analystes comme
« une preuve de conspiration et d’ingérence ».
Un rendez-vous similaire eut
lieu en 2013, qui souleva de fortes manifestations de la
part de syndicaux, d’hommes politiques et d’étudiants,
contre la présence de ce qu’ils appelaient « des invités
indésirables ». Parmi les invités : Mario Vargas Llosa
et Aznar, partisans acharnés d’un retour au
néolibéralisme et de la fin des « régimes populistes et
totalitaires ».
En plus des fonds alloués par
l’Heritage Foudation, la Fondation Libertad, dont le
siège principal se trouve à Rosario – considérée comme
une ville stratégique en tant que centre de ressources
alimentaires – reçoit des financements de l’Agence des
États-Unis pour le développement (USAID) et du National
Endowment for Democracy (NED).
À l’heure actuelle, la réunion
de cette organisation est source de préoccupation en
Argentine. Certains dirigeants syndicaux et politiques
de l’opposition, comme Luis Barrionuevo, du syndicat de
la gastronomie de la Confédération générale du travail,
ayant annoncé « un décembre violent ».
Nul n’ignore le rôle de ces
fondations dans les tentatives de coup d’État en Bolivie,
au Venezuela, en Équateur et en général dans toute la
région, si bien que chacune de ces réunions est
interprétée comme un signe avant-coureur d’une
multiplication des pressions sur le gouvernement de
Cristina Fernandez et d’autres plans régionaux non moins
dangereux.
Le paradoxe, c’est que cette
réunion ait eu lieu à Rosario, ville gouvernée par le
socialiste Antonio Bonfanti, qui assista aux débats,
auxquels participèrent en outre le sénateur, socialiste
également, Miguel Lifschtiz, le sénateur national et
président de l’Union civique radicale Ernesto Sanz, la
dirigeante de l’opposition Elisa Carrio, l’ex-président
Julio Cobos et l’ex-gouverneur de la province de Santa
Fe Hermes Binner, du Front élargi progressiste, tous sur
la liste des précandidats de l’opposition pour les
élections présidentielles de 2015.
Les dirigeants de la Société
rurale argentine et d’autres secteurs du patronat
étaient également au rendez-vous : Ian Vasquez du Centre
pour la Liberté et la Prospérité globale du CATO (États-Unis),
Miguel Angel Cortes, député pour Valladolid (Espagne),
Manuel Solanet, économiste, de Libertad y Progreso,
Javier Casas Rua, de PwC Argentina, Silvana Guidici,
présidente de la Fondation Liberté d’expression +
Démocratie, entre autres.
La liste des invités locaux est
longue et, comme l’affirment certains analystes à
Rosario, assez « suggestive ».
Le Congrès s’est achevé sur la
présentation du livre Cristina Fernandez, la véritable
histoire de Laura di Marco, et sur la téléconférence Le
chemin d’Argenzuela, avec la participation de Jorge
Lanata, journaliste au quotidien Clarin, l’un des plus
grands manipulateurs d’informations contre le
gouvernement argentin, et la Vénézuélienne Corina
Machado, présentés par Alvaro Vargas Llosa.
La réunion a été qualifiée par
un groupe de militants et d’intellectuels d’« événement
fasciste en ces temps durs pour le monde ». (Tiré de
La Jornada)
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