Un nouveau pas vers
la
décolonisation de Porto Rico
Lidice Valenzuela
Garcia
UN pas historique a été franchi dans le processus
d’indépendance de Porto Rico avec l’adoption, par le
Comité de décolonisation des Nations Unies, d’une
nouvelle résolution présentée par Cuba en faveur de la
volonté de la population de cette petite Île de la
Caraïbe de s’affranchir de la tutelle des États-Unis,
qui dure depuis 116 ans.

Dans la Déclaration finale du 2e Sommet de la
Communauté des États d’Amérique latine et de la Caraïbe
(CELAC) qui s’est tenu au mois de janvier à La Havane,
les 33 pays participants ont exigé le retour de Porto
Rico dans la région en tant que nation indépendante.
Même s’il s’agit du 33e document adopté par consensus
contre le statut colonial de l’Île caraïbe – et le 14e
consécutif –, c’est la première fois que plusieurs
représentations de l’Amérique latine apportent leur
soutien à une initiative présentée par Cuba au Comité de
décolonisation, ce qui constitue un signal fort que le
cas de Porto Rico, qui depuis cinq siècles est toujours
une colonie, s’inscrit dans les revendications
internationales de la région.
La reconnaissance de l’Île comme partie intégrante de
l’Amérique latine et non pas de sa métropole, figurait
au centre des revendications du 2e Sommet de la
Communauté des États d’Amérique latine et de la Caraïbe
(CELAC) qui s’est tenu au mois de janvier à La Havane en
présence d’une délégation portoricaine spécialement
invitée.
Wilma
Reveron Collazo, coprésidente du Mouvement
indépendantiste national hostosiano, a exigé
l’indépendance de Porto Rico devant le Comité de
décolonisation de l’ONU.
La Déclaration finale adoptée par les 33 pays
participant au Sommet a considéré comme une question de
principe le retour de Porto Rico au sein de notre région
comme une nation souveraine.
Quelques heures avant la réunion du Comité de
décolonisation de l’ONU, à New York, à Porto Rico des
centaines de manifestants ont défilé dans les
principales artères de l’île pour exiger l’indépendance
de l’Île vis-à-vis des États-Unis, qui la considère
comme un « État libre associé », même si la majorité de
la population portoricaine s’était prononcée contre le
maintien du statut actuel.
Présenté pendant 14 années consécutives, le document
cubain, auquel ont également adhéré la Bolivie,
l’Équateur, le Venezuela et le Nicaragua, enjoint le
gouvernement des États-Unis d’assumer ses
responsabilités sur la question de Porto Rico,
conformément à l’appel lancé par l’ONU en 1960 de mettre
fin au colonialisme sur la planète.
Manifestation
pour l’indépendance de Porto Rico.
Par ailleurs, l’initiative réaffirme le caractère
latino-américain et caribéen de Porto Rico, qui n’est
pas une simple « affaire intérieure de ses habitants »
comme on l’a longtemps prétendu à Washington.
La majorité des Portoricains sont contre l’actuel
statut de soumission politique, précise le document, « qui
empêche de prendre des décisions souveraines pour
satisfaire les besoins et relever les défis, dont les
graves problèmes économiques et sociaux de l’Île ».
À l’heure actuelle, indique la résolution adoptée, il
existe un débat parmi les différentes forces politiques
et sociales portoricaines pour jeter les bases leur
permettant d’entamer le processus de décolonisation.
Plus d’une cinquantaine de représentants
d’organisations politiques portoricaines étaient
présents à la réunion du Comité, dont la coprésidente du
Mouvement indépendantiste national hostosiano (MINH),
Wilma Reveron Collazo.
Symbole
des relations historiques entre Cuba et Porto Rico : le
général Juan Rius Rivera, qui rejoignit en 1870 les
rangs de l’Armée cubaine de libération et participa à
plusieurs guerres jusqu’à atteindre ce haut grade dans
la hiérarchie militaire.
Avocate et militante des droits de l’Homme, la
dirigeante du MINH s’est félicitée lors d’une interview
pour l’agence Prensa Latina de l’engagement de Cuba en
faveur de l’indépendance de Porto Rico.
« Sans la Révolution cubaine, cette cause n’aurait
pas progressé, et nous n’aurions pas pu bénéficier du
soutien d’autres peuples et d’autres gouvernements, et
ce panorama nous donne la force et l’énergie pour
continuer la lutte que nous menons depuis cinq siècles
pour la décolonisation », a-t-elle dit.
Cuba et Porto Rico ont lutté ensemble pour se libérer
du joug de la métropole espagnole depuis le XIXe siècle.
Plusieurs Portoricains prirent part aux luttes de
libération cubaines, depuis la première guerre, en 1868,
jusqu’à la guerre d’indépendance de 1895. Depuis, Cuba
n’a eu de cesse de lutter pour obtenir l’indépendance de
cette petite Île voisine, qui souffre toujours une
situation coloniale.
Symbole des relations historiques entre nos deux pays :
le général Juan Rius Rivera, qui rejoignit en 1870 les
rangs de l’Armée cubaine de libération et participa à
plusieurs guerres jusqu’à atteindre ce haut grade dans
la hiérarchie militaire. Une fois la guerre
d’indépendance terminée – il avait combattu sous les
ordres du général Maximo Gomez –, dans la province de
Pinar del Rio, Rius Rivera fut élu membre de l’Assemblée
constituante qui en 1901 rédigea la première
Constitution nationale de Cuba. Cependant, l’imposition,
par les États-Unis, de l’amendement Platt dans le
document précipita son départ en 1907. Le général Juan
Rius Rivera décéda en 1924 au Honduras, et ses restes
furent ramenés à La Havane en 1958 et inhumés au
Cimetière de Colomb.
Les
Portoricaines aussi manifestent pour l’indépendance de
leur pays.
Pendant les préparatifs des guerres d’indépendance
dans la Caraïbe, en 1892 fut créé à New York le Club
Borinquen, affilié au Parti révolutionnaire cubain (PRC)
fondé par José Marti. Ce club regroupait les Cubains et
les Portoricains qui étaient partisans d’une guerre
conjointe pour libérer les deux îles de la métropole
européenne. En 1895, au déclenchement de la guerre
d’indépendance à Cuba dirigée par José Marti, fut créée
la section de Porto Rico au sein du PRC. Le 22 décembre
de cette même année, 59 Portoricains adhérèrent au Parti
révolutionnaire cubain.
La bannière nationale est un autre élément qui
illustre les liens qui nous unissent. Il est signalé
dans les archives historiques :
« Torreforte, survivant du soulèvement du Grito de
Lares, présenta un nouveau drapeau (de Porto Rico) qui
ressemblait fort au drapeau de Cuba, à l’exception des
couleurs qui étaient inversées: cinq bandes horizontales
rouges et blanches avec triangle bleu sur le guindant
surmonté d’une étes îles de Cuba et de Porto Rico, qui à
elles deux devraient réunoile blanche ».
La libération de Cuba et de Porto Rico du joug
espagnol figura également parmi les dessins du
Libertador Simon Bolivar dans sa gigantesque épopée pour
l’indépendance des pays d’Amérique latine.
À une certaine occasion, Bolivar déclara : « Lir une
population de 700 000 à 800 000 âmes, sont les
possessions les plus tranquilles pour les Espagnols car
elles n’ont aucun contact avec les indépendantistes.
Mais ces insulaires ne sont-ils pas eux aussi américains ?
Ne sont-ils pas soumis à mille vexations ? Ne veulent-ils
pas trouver leur bien-être ? »
En 1898, durant la guerre dite « hispano-américaine »,
qui fut marquée par l’intervention opportuniste du
voisin du Nord dans le conflit, alors que l’occupant
espagnol était pratiquement battu par l’Armée de
libération cubaine, Porto Rico fut occupée et annexée à
la puissance du Nord.
La cause des indépendantistes portoricains,
considérée par les Cubains comme leur propre cause, est
devenue, par le biais de la CELAC, la cause de tout un
continent.
Les spécialistes estiment qu’il ne sera pas facile
pour ce noble peuple de s’affranchir de la domination de
la plus grande puissance de la planète. Mais une
solution pourrait être trouvée par la voie diplomatique,
comme on l’a vu dernièrement à l’ONU, où les
représentants de la CELAC et du Mouvement des pays non
alignés se sont prononcés en faveur de
l’autodétermination de ce petit pays de la Caraïbe. (Tiré
de Cubahora)