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La Havane. 30 Avril 2014

L’AQUARIUM NATIONAL
Un ami aux portes toujours ouvertes

Lisanka Gonzalez Suarez / Photos Anabel Diaz Mena

ALORS que je me dirige tranquillement vers l’entrée de l’Aquarium national, je repense aux informations lues aux premières heures de la matinée. Certaines d’entre elles préoccupantes : création d’un camp au Nord de la Syrie pour l’entraînement d’enfants-suicide… étudiants poignardés dans une école nord-américaine… Au moment où je me demande les raisons de cette violence, un car plein d’écoliers s’arrête devant moi, laissant descendre un tourbillon d’enfants qui s’engagent sur le sentier qui mène au bassin des loups de mer.


Le rêve de Guillermo Garcia Montero, directeur de l’Aquarium, est de terminer la réhabilitation de l’aquarium et de lui rendre sa splendeur d’antan.

Une bousculade fraternelle les a certainement opposés à l’approche du mammifère marin qui semblait les attendre. En effet, lorsque j’arrivai, l’animal, tout en remuant ses ailettes en signe de satisfaction, « donnait un baiser » sur la joue d’un des plus jeunes enfants.

Cette scène attendrissante me ramène aux nouvelles lues ce matin et je ne peux éviter de comparer la situation des enfants cubains à celle d’enfants d’autres pays, qui vivent dans un abandon total, privés des joies de l’enfance, sans accès à la scolarité, travaillant comme des adultes, se prostituant ou allant à la guerre.

Je pense également à ceux qui, même s’ils vivent dans des pays développés, avec de bonnes conditions de vie, manquent de la plus élémentaire sécurité, ce qui constitue un réel problème pour leurs parents. C’est pourquoi, certains parents décident d’envoyer leurs enfants passer leurs vacances dans la famille, restée sur cette petite île sous-développée de la Caraïbe, où les enfants vont seuls à l’aquarium et jouent sans danger dans les parcs de leur quartier.

L’Aquarium national que je visite aujourd’hui, a plus d’un demi-siècle. Guillermo Garcia Montero, son directeur depuis 24 ans, est lié à ce lieu, d’une manière ou d’une autre, depuis sa fondation. Il se souvient que l’idée de sa construction est née dès les premiers mois du triomphe de la Révolution et qu’elle a commencé à se matérialiser en juin 1959, quand l’équipe de 6 à 7 compagnons qui travaillaient au projet ont créé les laboratoires expérimentaux, établi des relations avec d’autres aquariums dans le monde et passé des contrats avec des entreprises étrangères pour acquérir les matériaux nécessaires à sa construction.


Un couple de dauphins dansant sur un air de boléro.

C’est ainsi que le dimanche 23 janvier 1960, le petit Aquarium, situé dans le quartier Miramar de la capitale, a ouvert ses portes, avec un peu plus de 30 employés et environ 1 500 exemplaires d’une centaines d’espèces marines, avec pour objectif d’être un centre de divulgation, de récréation et de science. Des objectifs qu’il a conservées tout au long de ces 54 ans.

« À ce moment-là, l’Aquarium de Cuba fut le premier de ce type construit en Amérique latine et un des premiers dans le monde. En Europe, il n’y en avait que deux ou trois, alors qu’au Japon et au États-Unis, il y en avait beaucoup plus », affirme le directeur.

les assauts de LA NATURE

Depuis lors, l’Aquarium a connu de belles périodes et des temps difficiles où il a fallu faire face à de multiples problèmes matériels et pénuries, notamment durant la Période spéciale des années 90, qui fut particulièrement dure. On peut dire que les efforts ont été payants.


Le « baiser » de l’otarie. Un moment attendu par tous les enfants.

Par contre, avec la nature, c’est bien différent : les inondations provoquées par les ouragans qui traversent régulièrement la ville ont causé des dommages importants à plusieurs installations de l’Aquarium. Certaines ont été remplacées et d’autres sont en voie de réparation, si bien que les projets en cours ont pris du retard.

La première phase de la première étape de réparation a pris fin en 2000, avec la construction de la nouvelle entrée de l’Aquarium. Deux ans plus tard, ce fut l’inauguration de nouveaux bassins, des aquariums, ainsi que de plusieurs aires. En ce moment, de nouveaux travaux sont en cours, comme l’agrandissement du centre de biodiversité, une cafétéria d’une capacité de 400 personnes, ainsi qu’un centre d’éducation environnementale, qui est à moitié terminé.

Malgré ces retards dans les réparations, l’Aquarium accueille annuellement 550 000 visiteurs, un nombre qui s’est maintenu au cours de ces 17 dernières années, avec un pic de visites de 750 000 personnes lors de l’inauguration de la seconde partie.

Aujourd’hui, les anciennes et les nouvelles générations de techniciens, de spécialistes et d’employés se heurtent à d’autres problèmes, si bien qu’il est difficile de donner une date précise de fin des travaux. « Je ne peux pas répondre à cette question aujourd’hui. Nous allons démarrer la troisième phase qui sera la construction d’un nouvel aquarium. »

C’est pourquoi, biologistes, techniciens, entraîneurs, personnels de services et de restauration travaillent en étroite coopération pour faire face à ce nouveau défi.

« Actuellement, il y a des aquariums seulement au Brésil, en Argentine, au Mexique et au Venezuela, un aquarium d’eau douce. D’aussi grand que celui-ci, je en pense pas qu’il y en ait dans la région et pour ce qui concerne les spectacles avec les dauphins et les loups de mer, en plus des exhibitions que nous réalisons, notre aquarium peut être considéré comme l’un des meilleurs d’Amérique latine, indépendamment du fait qu’aujourd’hui nous travaillons à la restauration de l’ensemble des installations, et que les travaux vont durer un ou deux ans », a dit le directeur.

ENTOURÉS PAR LA MER

L’aquarium est pionnier au niveau mondial dans la mise en œuvre de programmes éducatifs qu’il organise avec ses propres ressources. Un des exemples en sont les Journées enfantines de la Science, qui sont organisées depuis 1994, et auxquelles participent des enfants de presque tout le pays. Par hasard, lors de notre visite à l’aquarium se déroulaient les 19e Journées auxquelles participaient 624 enfants, dont 274 de 11 provinces et 20 municipalités du centre du pays, et le reste de la capitale.

Cette rencontre donne l’occasion aux enfants des jardins d’enfants, des écoles primaires et secondaires, des écoles spécialisées, d’art, de sport, de réaliser des centaines de travaux : dessins, affiches, chants, exposés, contes, céramiques, danses, multimédia, jeux didactiques et autres sur le thème de l’environnement et de sa communauté, dont la qualité de beaucoup d’entre eux dépasse les attentes.

« Toutes ces activités sont exclusivement financées par l’Aquarium. L’établissement est totalement autosuffisant depuis 1997. Par contre, nous recevons une subvention en monnaie nationale pour les travaux de construction », souligne le directeur.

L’aquarium maintient des relations avec des organismes internationaux, comme l’UNESCO, qui a offert son aide pour des activités d’éducation environnementale, les recherches et autres, mais non pour les activités quotidiennes ni les investissements.

Le prix d’entrée est très bas pour le public cubain : « Symbolique », dit-il. Il donne le droit de profiter de certains des spectacles de très haute qualité. Les entrées rapportent environ 8,5 à 9 millions de pesos par an, auxquels s’ajoutent les entrées payées par les touristes étrangers en pesos convertibles (CUC).

L’Aquarium national est le plus important de Cuba, et même si les réparations ne sont pas achevées, il est visité quotidiennement par des dizaines d’enfants, qui traduisent leur plaisir en applaudissant longuement les pirouettes des dauphins ou des loups marins, récompensant ainsi les efforts des plus de 300 employés qui rendent possible ce spectacle magique.

Et loin de s’attarder sur les travaux en cours, les enfants n’ont d’yeux que pour les poissons, les plantes aquatiques et la mer, qui parfois menace d’envahir de nouveau ce point de la côte.

Ce ne sont plus les temps du phoque Silvia, héros de mes enfants il y a environ 30 ans, dont mon père présenta la photographie dans une exposition, alors qu’il s’envolait presque de la piscine. Il n’est plus là, ni le dauphin Diana qui se laissa capturer de nouveau après avoir été rendu à la liberté, ni Yolanda son entraîneur, ni le mirador, ni mon père… C’est une autre époque, d’autres générations et un aquarium différent, mais tous ceux qui l’ont apprécié lui en sont reconnaissants.


La première femme entraîneuse :

Yolanda Alfonso Hernandez

Elle avait 18 ans lorsqu’elle est arrivée à l’Aquarium comme auxiliaire de service. Peu après, elle a travaillé à la cafétéria comme serveuse, puis elle a été nommée gardienne.


Diana et Yoly.

Yolanda travailla dans différents services jusqu’à l’arrivée des dauphins. Elle fut tellement fascinée par leur long corps robuste qu’il lui était difficile de ne pas suivre leurs mouvements à travers le mur de verre du bassin. Sa curiosité attira l’attention de la direction de l’Aquarium, si bien que lorsque 6 nouveaux dauphins arrivèrent avec deux techniciens de l’Institut de la pêche de Mexico, elle fut sélectionnée ainsi qu’un jeune homme pour avoir une formation sur l’entraînement des dauphins et des loups de mer. Ils ne lui faisaient pas peur, cependant elle était impressionnée par leur regard sous l’eau.

« C’est ainsi que nous sommes devenus les premiers entraîneurs des dauphins Diana et Ciclon, que nous avons libérés 11 ans plus tard. Nous les avons emmenés à un point de la côte où se trouvait un banc de dauphins et nous les avons relâchés. J’ai beaucoup pleuré. Au bout de deux ans, nous avons de nouveau capturé Diana au même endroit que la première fois, au Cayo Diana, à Varadero, mais comme elle attendait des petits, nous l’avons relâchée. »

En ce moment, il y a 8 dauphins et une douzaine d’entraîneurs à l’Aquarium, dont certains ont été formés par Yolanda et d’autres par des entraîneurs qu’elle a formés.

Actuellement, Yolanda donne des cours d’éducation environnementale, et au moment où je me suis entretenue avec elle, elle évaluait les travaux sélectionnés pour le concours de la Journée enfantine.

En dehors des cours et de ses autres activités, la première entraîneuse féminine de l’Aquarium continue de rendre visite aux dauphins qui, même si désormais elle les connaît très bien, ne cessent pas de la fasciner.
 

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